Revue de presse du 19 mars 2021 :Un coup d’État en 2021

Crédits photographiques : Own work

Depuis le 1er février 2021, suite à un coup d’état, prenant en otage les membres du gouvernement, l’armée a repris le contrôle politique en Birmanie

Pour une meilleure compréhension du sujet, rétablissons le contexte.

La Birmanie est située au sud-est de l’Asie. Elle a pour voisins le Bangladesh, l’Inde, la Chine, le Laos et la Thaïlande. Elle gagne son indépendance face aux Anglais en 1948. De 1962 à 2011, des régimes politiques dirigés par l’armée se succèdent jusqu’à l’arrivée d’un nouveau gouvernent plus axé vers un retour aux règles civiles. Aung San Suu Kyi devient alors cheffe du gouvernent.

Mais qui est-elle ? Aung San Suu Kyi, activiste birmane, apparaît comme la tête des rebellions pacifistes se déroulant contre les forces armées. Elle devient connue dans les années 90 grâce à ses campagnes pour la restauration de la démocratie en Birmanie. Elle est arrêtée et assignée à résidence de 1989 à 2015  en raison de ses actions contre le gouvernement. Depuis sa résidence surveillée en 1991, elle se voit attribuer le Prix Nobel de la paix. En 2015, son parti politique gagne les élections et la nomme cheffe du gouvernement birman. En 2016, elle fait l’objet de critiques à travers le monde en raison de son attitude envers les exactions de l’armée birmane contre les Rohingya, groupe ethnique de confession musulmane. Elle défend par ailleurs son pays devant les instances internationales, récusant l’accusation de génocide.

Or, depuis février 2021, l’armée a repris le contrôle du pays, juste après la réélection du parti de Mme Suu Kyi. En effet, prétextant une fraude, les forces armées demandent le recompte des votes. Mais la commission électorale n’a pas retenu leurs plaintes, faute de preuves solides. De ce fait, le coup d’État est monté et Mme Suu Kyi et les autres hauts membres de son gouvernement sont à ce jour, encore retenus en détention.

Puis, entamons plus profondément le cœur du sujet.

“”Au moins 138 manifestants pacifiques” dont des femmes et des enfants, ont été tués depuis le coup d’État du 1er février en Birmanie, a affirmé, lundi 15 mars, le porte-parole du secrétaire général de l’Organisation des Nations unies (ONU), Stéphane Dujarric, citant les chiffres du Haut-Commissariat aux droits de l’homme.”. C’est une révélation choc que nous annonce le journal Le Monde, le 15 mars 2021. En effet, le bilan le plus lourd a été effectué le week-end qui précédait ce lundi, 18 personnes tuées le samedi et 38 le dimanche. Cette répression est accompagnée de plusieurs arrestations, 2000, ” dont Aung San Suu Kyi, 75 ans, toujours tenue au secret.” Le journal ajoute que “les opposants à la junte ne désarment pas”. Ces conséquences ne suffisent pas à arrêter les tensions ainsi que les manifestants, qui maintenant, s’en prennent aux usines chinoises. “Trente-deux usines dans lesquelles la Chine a investi ont été vandalisées, avec près de 37 millions de dollars de biens détruits, a fait savoir le média chinois Global Times, faisant état de deux blessés.”, précise le journal. Quelques unes se trouvaient à Hlaing Tharyar, une banlieue industrielle de Rangoun où plusieurs usines chinoises ont été incendiés. “Vingt-deux protestataires ont été tués par les forces de l’ordre.” Pourquoi ces hostilités envers la Chine ? “Certains opposants estiment que le géant asiatique, qui a appelé à la désescalade, a une position trop douce vis-à-vis des généraux birmans.”

“Des femmes mobilisées”, évoque par son sous-titre, le magasine Elle. “Éduquées, actives, politisées, les jeunes Birmanes prennent désormais la tête de la rébellion”, affirme l’hebdomadaire. Notamment cette jeune femme de 19 ans, qui lors d’une manifestation pacifiste le 3 mars dernier, succombait à une balle reçue en pleine tête par les forces de sécurité pour disperser la foule. Ma Kyal Sin, est devenue “le symbole de la résistance de la jeunesse birmane”. Le jour de son exécution, elle portait un t-shirt sur lequel était inscrit “Everthing will be OK” (“tout ira bien”), montrant son optimiste, l’espoir malgré la situation. Surnommée Angel, elle est devenue une figure d’exemple, un “symbole de bravoure” pour toute une génération. Ses funérailles furent d’ailleurs à l’image de sa notoriété, une foule immense se regroupant et l’accompagnant pour son dernier voyage.

Par le biais de témoignages, Valentine Pasquesoone, journaliste à FranceInfo le 17 mars 2021, décide, elle, de présenter la nouvelle génération comme la principale touchée par ces hostilités. Elle recueille ce témoignage : “Croyez-moi, l’âge moyen dans les manifestants est entre 14 et 25 ans”, abonde James, un manifestant de 33 ans.” et insiste donc sur une jeunesse, de la “génération Z”. Celle-ci utilise les réseaux sociaux afin de diffuser les vérités qui éclatent dans leur pays et cherche du soutien : “Nombre de jeunes Birmans suivent ses pas, partageant sur les réseaux sociaux les preuves des crimes de l’armée. Les manifestants sont particulièrement réactifs en ligne.”. La journaliste met également en avant les paroles de Chu, une étudiante de 19 ans qui explique le comportement inquiet de ses parents indiquant “[qu’]ils ont vu les meurtres en 1988, ils ont vu a brutalité de la police” et ont peur que leur fille soit détenue, comme la plupart des parents des adolescentes partis manifester. Seulement, cette “révolution est plus importante que [leur] vie”, résume l’adolescente. L’article se termine par une révélation de Chu, qui montre l’universalité de la cause : “Si les gens ont donné leurs vies pour la la révolution, pourquoi pas moi ?”.

Puis, Courrier International indique le pacifisme des manifestants par d’autres signes distinctifs, le mercredi 17 mars 2021. Le plus connu est celui des trois doigts, “the three-finger”, un symbole repris du film Hunger Games. Il représente la résistance et la solidarité dans les mouvements démocratiques basés au Sud-Est de l’Asie. Mais un nouveau moyen voit le jour, celui du tatouage. Certains n’hésitent pas à se tourner “vers les salons de tatouage pour ancrer de manière indélébile leur combat dans leur peau”. Ils choisissent des inscriptions tels que “Freedom from fear” (“Libérons-nous de la peur”), “Spring Revolution” (“Révolution du printemps”) ou bien encore “le visage d’Aung San Suu Kyi, opposante historique à la dictature”. Les salons, en proposant le tatouage gratuit à ceux qui “demandaient des motifs liés au mouvement prodémocratie”, “auraient été arrêtées dans leurs activités”. Toutefois, les salons continuent “de proposer discrètement leurs services”.

Enfin, dans un tout autre registre, le 16 mars 2021, La Tribune, un journal économique et financier, fait le point sur les possibles sanctions que pourrait attribuer l’UE contre “les responsables du coup d’Etat”. Ces sanctions, qui seront validées lors du conseil des affaires étrangères, ce lundi 22 mars, concernent “la suspension de tout soutien budgétaire et des mesures visant très directement les responsables du coup d’Etat militaire en ciblant les personnes et leurs propres intérêts économiques”, évoque Jean-Yves Le Drian, ministre des affaires étrangères. La Tribune réaffirme également les sanctions déjà mise en place par l’Union Européenne envers le putsch militaire birman : “l’UE a déjà instauré un embargo sur les armes à destination de la Birmanie ciblant des représentants militaires depuis 2018”.

Aurianne BROCHARD